Étude CO’WORKER : suivi épidémiologique des travailleurs sous-traitants de grandes entreprises du secteur nucléaire surveillés pour exposition à des rayonnements ionisants
Contexte
Les suivis épidémiologiques des travailleurs du cycle électronucléaire réalisés à ce jour en France portent pour la plus grande majorité sur les salariés statutaires des grandes entreprises (Leuraud et al. 2017 ; Fournier et al. 2018 ; Laurent et al. 2023). Cette population est en effet celle pour laquelle les estimations des relations exposition-risques sont les plus fiables en raison de sa grande stabilité d’emploi qui permet une reconstitution précise des historiques professionnels et d’exposition, y compris en remontant sur plusieurs décennies (Samson et al. 2018).
Cependant, le suivi sanitaire des travailleurs exposés dans de plus petites entreprises, y compris celles exerçant des activités de prestation pour le compte de grandes entreprises, est également important. En effet, l’activité de prestation représente environ un tiers des effectifs du domaine nucléaire et plus des deux tiers de la dose collective de ce dernier, les prestataires réalisant une part très importante des opérations de maintenance des installations, au plus près de la radioactivité. Une étude réalisée par l’Inserm et publiée en 2009 a toutefois montré la difficulté à identifier les salariés concernés et à reconstituer, avec fiabilité et une précision suffisante, leurs historiques professionnels et d’exposition sur la période 1968-2002 (Guerin et al. 2009). La mise en place en 2005 du Système d'Information de la Surveillance de l'Exposition aux Rayonnements Ionisants (SISERI), registre géré l’ASNR (https://docs.siseri.asnr.fr), représente une opportunité de retracer avec davantage de fiabilité les historiques des travailleurs de ces entreprises, pour les années récentes et pour l’avenir, ce qui ouvre la voie à un suivi épidémiologique de bonne qualité.
Un suivi épidémiologique des travailleurs sous-traitants de grandes entreprises du secteur nucléaire surveillés pour exposition à des rayonnements ionisants, l’étude CO-WORKER (COntract WORKers Exposed to ionizing Radiation), est mis en place par le Laboratoire d’épidémiologie des rayonnements ionisants de l’ASNR.
Objectifs
Cette étude a pour but d'évaluer la santé des travailleurs sous-traitants de grandes entreprises de l’industrie nucléaire au moyen de l’analyse épidémiologique d’une cohorte basée sur les données, d’une part, du registre SISERI pour les expositions aux rayonnements ionisants (période 2005-2022) et, d’autre part, du Système National des Données de Santé (SNDS) pour renseigner les pathologies et la mortalité survenues dans la cohorte.
Description
Tous les travailleurs ayant au moins un enregistrement dosimétrique dans le registre SISERI pour le compte d’une entreprise sous-traitante sur un site nucléaire entre 2005 et 2019 sont inclus.
Les personnes dont la dosimétrie passive est non renseignée (les visiteurs par exemple), pour lesquelles la période de suivi dosimétrique s’étend uniquement avant 2005 ou qui sont devenus statutaires d’EDF, du CEA ou d’Orano pendant le suivi (travailleurs inclus dans la cohorte SELTINE déjà suivie par l’ASNR) sont exclus de cette étude.
Les données de santé seront obtenues via le SNDS, à savoir les informations issues des hospitalisations y compris à domicile, les consommations de soins et les causes de décès. La mortalité et l’incidence de pathologies au sein de la cohorte seront comparées à celles de la population générale.
Principaux résultats
L’étude de faisabilité réalisée par l’IRSN en 2022 a permis d’identifier une population d’environ 50 000 personnes étant intervenues sur les seuls sites EDF entre 2015 et 2019.
La cohorte CO’WORKER est constituée en 2025 et les résultats des analyses sont prévus pour fin 2027.
Références
Fournier, L., E. Clero, et al. (2018). Impact of considering non-occupational radiation exposure on the association between occupational dose and solid cancer among French nuclear workers. Occup Environ Med 75(3): 199-204.
Guerin, S., G. Richard, et al. (2009). Cancer mortality among French nuclear contract workers. Am J Ind Med 52(12): 916-925.
Laurent, O., E. Samson, et al. (2023). Updated mortality analysis of SELTINE, the French cohort of nuclear workers, 1968-2014. Cancers 2023, 15, 79.
Leuraud, K., L. Fournier, et al. (2017). Mortality in the French cohort of nuclear workers. Radioprotection 52(3): 199-210.
Samson, E., K. Leuraud, et al. (2018). Bilan de la surveillance épidémiologique des travailleurs du cycle électronucléaire en France. Radioprotection 53(3): 175-184.
La mise en œuvre de cette étude s’appuie sur la décision CNIL n°DR-2012-611, permettant à l’IRSN, maintenant l’ASNR, le traitement des données ayant pour finalité la « mise en œuvre d’une étude de cohorte effectuée auprès des travailleurs du nucléaire français ». La validité de cette décision en date de 2012 a été confirmée le 26 avril 2019 par la lettre de la CNIL référencée TD/MFI/COBR191011. Conformément aux dispositions de l’article 13 ou 14 du règlement général sur la protection des données, les participants sont informés de l’étude par leur médecin du travail, lors de leur visite médicale en cabinet ou via le site internet de l’ASNR pour les travailleurs ayant changé d’emploi ou retraités.
Financements : ASNR (50 %) et EDF (50 %)